Immobilier de l'ancien : que s'est-il passé en 2022 ?
Si 2021 était l’année de tous les records, 2022 marque un retournement du marché.
Les transactions qui étaient encore florissantes au 1er semestre 2022 (enregistrant une progression à 2 chiffres par rapport au semestre précédent) ont connu un vrai ralentissement durant l’été.
La cause en est une conjonction de plusieurs facteurs : l’évolution rapide des taux de crédit qui ont plus que doublé en un an (passant de 1,07% en moyenne en janvier à 2,25% en novembre). Parallèlement le taux d’usure, qui s’est ajusté avec retard, a rendu automatiquement inéligibles certains dossiers de crédit. Ainsi, dans le Réseau CENTURY 21, le nombre de compromis annulés au motif de refus de prêt est passé de 3,2% en moyenne au 1er semestre 2022 à 6% au second.
Cette proportion est toutefois bien moins importante que ce qu’ont pu déclarer certains opérateurs du marché, dont la communication alarmiste a sans doute contribué à freiner les projets immobiliers davantage encore que le durcissement des conditions d’emprunt. A ces facteurs s’est ajouté un contexte international particulièrement préoccupant, provoquant une crise énergétique et avec elle une hausse brutale de l’inflation en France passant de 2,9% en janvier à 6,2% fin novembre.
Au global, l’activité immobilière sur l’année recule de 4,1%, conséquence d’un ralentissement très affirmé du marché des maisons (-8,2%) qui revient sans doute à la normale après des années post Covid où les maisons étaient particulièrement prisées.
Les prix en revanche continuent leur ascension débutée en 2015, et le prix moyen au m² des maisons progresse de +7,1% en 2022 tandis que celui des appartements augmente de +4%, pour s’établir respectivement à 2619€ et 4288€ le m². Il s’agit de records historiques. Ces moyennes cachent cependant les fluctuations observées au mois le mois, montrant que les prix ont atteint un pic durant l’été pour commencer à décroître au second semestre.
A l’inverse de la tendance nationale, Paris voit ses prix reculer en 2022 de -2,4% par rapport à 2021. Plus précisément, cette baisse s’observe essentiellement à partir du mois de juin, et pour la première fois depuis longtemps, le prix moyen au m² est passé en septembre en-dessous du seuil symbolique des 10 000€. Sur l’année, il s’établit désormais à 10 339€ le m².
Grâce à ce réajustement des prix, le marché parisien a retrouvé des couleurs. Sur l’année, les transactions parisiennes sont en progression de +5,9%. Malgré tout, les délais de vente s’allongent de 8 jours pour atteindre des niveaux historiquement hauts pour la Capitale.
Ces transactions parisiennes sont majoritairement dédiées à l’acquisition de la résidence principale et la part des investissements locatifs recule fortement (-10,9%) pour se situer à 30,3% des acquisitions soit un niveau antérieur à 2019.
En Ile-de-France l ’activité sur l’année est en recul de -6%, tirée vers le bas par le marché des maisons en forte contraction par rapport à 2021 (-10,9%).
L’un des facteurs de ce ralentissement est sans doute la hausse des prix des maisons (+5,5% sur un an pour atteindre un niveau record de 3848€ le m²) quand le prix moyen des appartements, lui, est demeuré stable.
Là encore, cette moyenne ne met pas en évidence le pic des prix atteint durant l’été, avant un atterrissage en douceur au second semestre. Cette évolution des prix n’a pas arrêté les investissements locatifs dont la part progresse pour représenter 25,8% des acquisitions, un niveau record pour la région francilienne.
Deux départements se distinguent dans cette région :
- La Seine-Saint-Denis est le seul département de toute l’Ile-de-France à progresser en nombre de transactions (+2,2%) tiré par le segment des maisons (+16% par rapport à 2021). Le dynamisme de ce marché s’explique par une évolution des prix très modérée en 2021 suivie d’une baisse des prix en 2022 (-2,8% tous types de biens confondus). Le prix moyen des maisons s’établit sur l’année à 3826€ le m² et celui des appartements à 4185€ le m².
- Le département des Hauts-de-Seine voit également son prix moyen au m² diminuer (-5,8% pour les maisons et -1,7% pour les appartements), et pourtant l’activité recule de -3,2% tandis que les délais de vente s’allongent substantiellement (+12 jours pour les appartements et +25 jours pour les maisons). Ce département est connu pour être le plus cher de la région (hors Paris) avec des prix se situant à 6627€ le m² pour une maison et 7415€ le m² en moyenne pour un appartement.
En Province, le paysage est très hétérogène en fonction des régions. A rebours des tendances nationales, à moins d’une heure de Paris en TGV, 3 départements ont le vent en poupe et enregistrent une hausse d’activité malgré une forte augmentation des prix. Ils bénéficient directement de leur proximité avec la Capitale et d’une infrastructure développée.
Il s’agit de l’Indre-et-Loire (le prix moyen au m² fait un bond de +10,1% pour les maisons et de +15,5% pour les appartements), le Loiret (l’activité est en hausse de +4,1% malgré des prix qui croissent considérablement : +10,3% pour le segment des maisons et +8,6% pour celui des appartements) et l’Eure-et-Loir (le nombre de transactions a augmenté de +7,6% par rapport à 2021 alors même que les prix s’envolent +9,3% pour les maisons et +8,8% pour
les appartements). Dans ce département, Chartres située à 1 h de TGV se distingue avec un nombre de transactions en hausse de +23,1% et des prix en nette accélération : +15,6% pour les maisons et +9,7% pour les appartements.
La dynamique observée dans ces départements est sans doute l’effet de l’après covid conjuguant forte appétence pour les maisons et capacité de télétravailler, permettant aux salariés de s’éloigner de la Capitale pour n’y revenir que quelques jours par mois.
Pour conclure, nul doute que nous entrons dans une période où les projets immobiliers vont se réfléchir et se peser davantage encore qu’auparavant. L’inflation grève le budget des ménages et le reste à vivre devient leur principale préoccupation. Dans ce contexte, les cartes sont rebattues et la préférence pour les maisons requestionnée, car au coût du logement direct (la mensualité en loyer ou crédit) s’additionnent les coûts indirects (assurance, coût de l’énergie pour chauffer, coût des transports pour se déplacer et se rendre au travail). La réflexion des ménages se porte ainsi sur le « coût d’habitation » dans son ensemble. Nous sortons d’une période d’abondance pour embrasser par nécessité davantage de modération, mais l’attrait pour la pierre est toujours tenace dans le coeur des Français. L’année 2023 ne devrait pas marquer un effondrement du marché mais un nécessaire ajustement des prix, au moins dans certains départements.